GELI

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Geli La Manufacture des Abbesses Affiche

Dimanche soir j’ai vu Geli, une pièce écrite et mise en scène par Diastème, jouée en ce moment au Théâtre de la Manufacture des Abbesses.

Geli, admirablement interprétée par Aliénor de la Gorce, c’est Angela Maria Raubal, la nièce d’Adolf Hitler, morte à 23 ans, que l’auteur avait déjà convoquée brièvement dans Les Châteaux de sable, intertextualité qui illustre bien le temps long du processus d’écriture.

Le deuxième personnage de la pièce est un écrivain qui écrit une pièce de théâtre sur la jeune femme en question, alors qu’il ne ne va pas très bien, que sa vie privée est désastreuse. Le sujet est grave, le contexte est lourd, le moment est intense, l’ambiance émouvante.

Comme toujours, les mots de Diastème sont d’une délicatesse absolue, les acteurs sont formidables, brillants, ils vous emportent dans leur histoire, avec pudeur et sensibilité. La mise en scène est sobre et nous plonge avec finesse dans une ambiance assez douce malgré tout.

Si les thèmes abordés restent douloureux, les mots, leur rythme, la musicalité qui se dégagent du texte en font un espace d’observation privilégié de la violence intrinsèque aux sujets.

Intrigué par la personnalité complexe de Geli, on est aussi touché par celle de cet écrivain, accablé mais valeureux, interprété avec subtilité par Frédéric Andrau. La mise en abyme de l’écrivain sur scène nous renvoie à la matérialité de l’écriture, à son pouvoir et à sa dimension libératrice : écrire permet de faire vivre les morts, tous les morts, et de rendre peut-être plus supportable l’absence de ceux qui ne le sont pas vraiment, morts. Ça remplit le vide créé par le manque. En quelque sorte.

Car ça fait quoi d’avoir le coeur en miettes, ça fait quoi de vivre avec, de passer son temps à essayer de faire taire le bruit de l’absence? 

Est-ce que l’oubli est nécessaire à la survie ? 

Diastème a écrit ça il y a longtemps, et c’est, semble-t-il une question qui le hante, qui nous hante.


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