Et j’ai rêvé.

cbrachetCritique, Humeur, MédiaLeave a Comment


Ce matin j’ai écouté en podcast le dernier épisode de La Suite dans les idées intitulé « Le rêve, cet obscur objet sociologique », consacré au dernier livre de Bernard Lahire, L’interprétation sociologique des rêves.

Et j’ai rêvé. J’ai laissé mon regard flotter sur le paysage, s’enfuir dans la campagne détrempée ou par-delà les nuages. Bercée par les voix du journaliste et de ses invités, j’ai écouté, m’éloignant parfois, happée par une forme de rêverie éveillée.

L’approche de Bernard Lahire était intrigante, elle est devenue passionnante. C’est un très beau sujet d’études, largement analysé et commenté par Freud, et discuté à nouveau et sous un autre angle dans l’étude de Bernard Lahire.

En ce moment je me souviens très bien de mes rêves, alors qu’habituellement ce n’est pas le cas, à de rares exceptions près, lorsque je suis réveillée en pleine nuit au milieu d’un rêve justement. Je me souviens aussi de mémorables cauchemars, souvent des conflits avec des proches, qui provoquent mon réveil, dans les larmes. Je me souviens aussi parfois de phrases très précises, souvent assez poétiques, des suites de mots que je n’aurais jamais prononcé éveillée. Et là je comprends Bernard Lahire lorsqu’il dit que le rêve est « une forme d’expression particulière, dans les conditions de quelqu’un qui dort ». Il dit aussi que rêver, ce serait se parler à soi-même, formulation qui a beaucoup plu à Marie Darrieussecq, invitée à rejoindre Bernard Lahire dans la deuxième partie de l’émission.

Le rapport aux rêves de l’écrivaine psychanalyste est intéressant. Bien que son activité de psychanalyste l’amène à entendre les récits de rêves des autres, aucun rêve ne lui a jamais donné une idée de roman. Mais si les rêves ne sont pas une source d’inspiration, la rêverie éveillée a quant à elle une grande importance dans le processus de création. Tous ses romans partent d’une rêverie éveillée, a-t-elle dit, et le jour de l’enregistrement de l’émission, Marie Darrieusecq s’apprêtait à aller travailler, et donc à rêver à ce qu’elle avait à écrire, en se promenant.

Le contexte actuel, métamorphosé par un régime de l’attention en mutation, fait bouger les lignes. Le rêve diurne n’a effectivement plus beaucoup de place, chaque espace vide étant comblé par l’usage de notre téléphone portable dans les files d’attente, dans les transports en commun. Dans le train, j’avais pour habitude de regarder défiler le paysage par la fenêtre, une activité qui laisse divaguer les pensées, propice au rêve éveillé et à la création. Or depuis quelques temps, je passe une grande partie du trajet le regard fixé sur mon téléphone portable, allant de ma boîte mails à mes messages, de Facebook à Instragram, faisant défiler des pages et des images, des titres et des mots. Je vais, je reviens, papillonne, mais ne regarde plus par la fenêtre, presque plus.

L’écoute de cette émission est tombée fort à propos puisque ce matin, quand mon réveil a sonné trop tôt et trop fort, j’étais en train de danser sous le soleil au milieu d’une immense pelouse, la pelouse du jardin de Carlos… le chanteur, si si.


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