Barbara, Khétévane, Isabelle, elle, et moi

cbrachetCinéma, Critique, LittératureLeave a Comment


Barbara. 20 ans. Des livres, des films, des expositions.

J’ai vu Barbara, le film de Mathieu Amalric avec l’immense Jeanne Balibar et j’ai été vraiment émue par ce portrait de femme, par la finesse du jeu, et convaincue par les choix scénaristiques de Mathieu Amalric.

J’ai aussi lu Barbara, notre plus belle histoire d’amour de Kéthévane Davrichewy et j’ai beaucoup aimé le travail d’enquête effectué, la façon dont elle a écouté les interrogés, les a fait parler de leurs rapports à Barbara, de la place qu’elle avait dans leurs vies. J’ai aimé sa façon d’articuler ces témoignages avec son propre ressenti. Kéthévane, je l’ai aperçue en sortant du spectacle Les Gens dans l’enveloppe, alors que j’étais justement en pleine lecture de son Barbara. Dans ce livre-là, j’ai aussi eu le plaisir de croiser Isabelle Monnin que je venais tout juste de laisser après avoir refermé Mistral perdu ou les événements, son dernier roman. Kéthévane dans le hall de la cité de la musique après le concert, rien d’étonnant. Et puis lui aussi il était là, lui et sa silhouette d’ours en peluche reconnaissable entre mille. Même de dos. Tout s’entremêlait, elle, lui, lui, elle, elle, et en sortant je suis dit qu’ils s’étaient bien trouvés, et que sans ces belles amitiés, le spectacle de ce soir n’aurait sans doute jamais existé. Eux forment un tout, tissent des liens et des cohérences entre leurs univers, érigent des ponts créatifs entre musique/lecture/écriture/cinéma. Ça aussi je trouve ça beau, beau comme le spectacle Les gens dans l’enveloppe qui reste un souvenir magnifique. Alors que je regardais défiler les photos, bouger les chanteurs sur la scène, alors que j’écoutais leurs voix lire et chanter, je me suis demandée. Comment peut-on produire tant de beauté ?

Quant à Barbara, la première fois où je l’ai vraiment écoutée, avec attention, c’était aux obsèques de ma tante, il y a presque dix ans maintenant. Je garde en mémoire cette photographie d’elle qui était posée devant moi pendant la cérémonie. Ce jour-là je me suis dit qu’elle était vraiment belle, d’une beauté assurée et fière, et je crois même avoir trouvé qu’elle lui ressemblait à Barbara. La posture peut-être, l’allure, immuable.

Ma tante était une femme forte, engagée, qui ne se laissait pas marcher sur les pieds. Je crois me souvenir qu’on la disait féministe, avec tout le mépris que mon père pouvait faire porter à ce terme. Les femmes aux fourneaux ou à repriser les chaussettes sont plutôt le genre de propos que j’ai entendus durant ma jeunesse et qui ont résonné avec une violence immense une fois adulte, à l’âge où on comprend à quel point le machisme et la misogynie sont intolérables et doivent être combattus. Parce que le livre est un puissant vecteur de transmission et que les textes écrits par les femmes sont souvent éminemment politiques, je lis ou relis ces femmes intellectuelles, engagées, Simone de Beauvoir, Françoise Héritier, Virginia Woolf, Virginie Despentes, Chimananda Ngozi Adichie, Mona Chollet et tant d’autres. J’écoute La Poudre aussi, et me sens plus féministe que jamais. Et si à l’époque des réunions de famille j’avais une dizaine d’année et ne comprenais sans doute pas vraiment les discussions d’adultes, j’ai dû finalement en percevoir l’essentiel et intégrer des valeurs, ses valeurs, devenues aujourd’hui les miennes.

Je pense souvent à elle, j’aurais aimé mieux la connaître.

Alors j’écoute Barbara.

C’était ma marraine et je crois qu’il n’y a pas de hasard.

 


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