Les Gens dans l’enveloppe

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Il y a quelques jours j’ai refermé Les Gens dans l’enveloppe.

J’ai terminé l’aventure et elle m’a bouleversée. Le livre, je l’avais chez moi depuis un certain temps déjà puisqu’acheté le jour de sa sortie – cinq exemplaires, de jolis cadeaux à faire.

J’ai d’abord écouté le disque, j’ai réécouté en boucle ces chansons qui accompagnent le livre, par facilité, par manque de temps, parce que c’est plus facile d’écouter que de lire, que cela nécessite moins de concentration. J’ai aimé les mélodies, les voix, j’ai écouté les textes, ils m’ont familiarisée avec un univers, avec des trajectoires, avec Clerval aussi.

Et puis enfin je me suis attaqué au livre.

Avant même de commencer, je trouvais l’idée géniale, disons que cela me parlait, beaucoup. Certains m’ont même dit qu’ils s’étonnaient que je n’ai pas eu l’idée de faire ça, qu’ils m’auraient bien vu me lancer dans ce genre de projet. Oui, peut-être, c’est vrai que j’ai tout de suite été séduite et conquise quand j’ai entendu parler du projet pour la première fois. Et c’est vrai que je me suis demandée pourquoi je n’y avais pas pensé, moi. J’aurais tellement aimé. Mais non, pas eu l’idée, pas celle là.

Si j’ai adoré l’idée, le projet, j’ai encore plus adoré le résultat, ce qui en soi n’est pas très étonnant puisque j’écoute avec assiduité les différents disques d’Alex Beaupain et que les précédents livres d’Isabelle Monnin m’ont tous touchée, m’ont tous plu, ou presque. Tous sauf un pour être tout à fait honnête. Parce que je n’ai pas encore réussi à le terminer.

Je n’ai jamais réussi à lire Les Vies extraordinaires d’Eugène. Je l’ai commencé, l’ai très vite arrêté, il me rendait si triste, me mettait si mal à l’aise. Je crois que ce livre me fait peur – il faut dire que la première fois que je l’ai ouvert, j’étais enceinte. Je l’ai très vite refermé. Depuis je n’ai pas eu le courage de recommencer. Je devrais. Je vais. Je ne sais pas.

Quand le prénom Eugène est apparu la première fois dans Les Gens dans l’enveloppe, les larmes me sont montées aux yeux, j’ai frissonné, et puis j’ai trouvé quelques pages plus loin de la douceur, de la poésie dans ces quelques mots : Eugène, le prénom de mon éphémère enfant, un souffle de vie et puis s’en va – et me reviennent les odeurs de l’hôpital. Beau mais sans doute tellement douloureux. Montée de larmes.

Il y a maintenant quelques années, j’ai rencontré Isabelle Monnin. J’ai trouvé que j’avais de la chance de pouvoir discuter avec elle. J’ai beaucoup aimé cette femme, je ne l’ai jamais revue mais cette rencontre m’a marquée. Plus tard j’ai lu Daffodil Silver, ce livre aussi m’a marquée, il me semble d’ailleurs que j’en ai parlé ici. Oui j’ai écrit sur ce livre, je voulais que les gens le lisent.
Je veux que les gens lisent aussi Les Gens dans l’enveloppe, car en plus d’être un roman original, c’est un objet conceptuel. C’est un roman, c’est une enquête, des photographies à observer, des chansons à écouter, un univers dans lequel s’immerger, un bel objet pour rêver en somme.

Le point de départ des gens dans l’enveloppe c’est une collection de photographies qui ont donné envie à un auteur d’inventer une sorte de ça a été comme aurait dit Roland Barthes. Inventer des vies, redonner une existence à des silhouettes inanimées, les remettre en mouvement. Imaginer une intrigue, recréer des situations, faire émerger des sentiments.

Et c’est réussi. L’histoire est belle, les mots nous emmènent, puis nous malmènent, les épreuves vécues par ces silhouettes devenues personnages sont cruelles, mais belles. Le récit progresse, et nous avançons, pris dans l’intrigue ; la fiction devient réelle, et alors qu’ils existent nous souffrons avec eux.

Et puis vient le temps de l’enquête. Là encore Isabelle Monnin nous prend par la main, et nous donne accès aux coulisses, elle partage ses doutes, ses hésitations avec générosité et honnêteté. De la genèse du projet à son aboutissement, en passant par des moments d’égarements, de flottements ponctuels, l’auteur nous explique les étapes qui se sont succédées et qui font des Gens dans l’enveloppe une expérience pleine et unique.

Et puis les chansons d’Alex, petites ritournelles qui nous trottent dans la tête et qui font que toujours ces gens seront là, à nos côtés.

Le temps de la lecture terminé, il reste le disque à réécouter autrement, il reste ces lieux, ces gens, et je les revois ces visages, ces corps, ces mises en scène, et leurs histoires sont ancrées en moi.


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